La Nephilim a qui j’avais voulu proposer de l’aide avait de toutes évidences son caractère et semblait ne vouloir en rien le changer. Ce qui se passa avec elle lorsque je lui demandais si elle voulait de l’aide avait été assez surprenant, elle avait une grande assurance de toutes évidences, et elle ne comptait nullement qu’un humain l’aide, même si sans doute elle y viendrait avant longtemps pour de l’orgone. Se souviendrait-elle alors de ma demande ? Qui sait si elle et moi ne finirions pas finalement par s’aider mutuellement. Pas sûr que j’arrive à lui faire confiance, mais s’il fallait l’aider, je le ferais et si mes sourires n’y suffisaient pas, je tenterais autre chose, quitte à essuyer des échecs cuisants. Mais puisque pour le moment elle ne voulait rien, je préférais retourner voir celle envers qui j’avais une promesse car désormais une hiérarchie était instaurée, celui que l’on nommait Harahel en tête de la troupe puisqu’il connaissait apparemment les lieux. Nous nous étions mis en marche, chacun emportant une partie des provisions, l’intérêt commun nous motivait tous, et chacun y mettait du sien eut-il été Nephilim ou humain. Combien de temps avons-nous marcher ? Je ne saurais le dire, entre la douleur qui brulait en mes côtes, l’épuisement de la marche et la peur quasi-constante d’être attaqués, il se passait bien trop de choses pour pouvoir garder la tête assez froide pour s’inquiéter de la distance parcourue. En tous les cas, le Lilioth n’avait pas mentis, il y avait bien une forêt qui nous abritait des attaques. Hors de question cependant de partir sur une confiance parfaite dans les lieux, des tours de garde étaient organisés, et le rationnement des vivres étaient assurément une autre priorité. Avec celle, surement la plus capitale d’ailleurs, de rester en vie. Pourtant cette première nuit fut des plus étranges, chacun semblant rester dans son coin, où très peu de couple se formant. Les Nephilim et les humains semblaient avoir peur de s’approcher les uns des autres, et pourtant chacun savait que nous y viendrions avant longtemps. Dépendance mutuelle des uns et des autres oblige. Quand à moi ? Et bien j’affichais toujours un sourire enthousiaste et une grande assurance en notre survie. Je cachais ma peur sous ce masque de courage, d’assurance et d’enthousiasme, notamment avec cette Nephilim que j’avais rencontré peu après ma chute. Elle semblait perdue, nous l’étions finalement tous. Je prenais sur moi de lui sourire et lui donner autant de bonne humeur que possible, j’avais une promesse à honorer non ?
Et le temps passait vite, nous fûmes bientôt le second soir, une autre longue journée de marche épuisante, mais le plus épuisant était de feindre de ne pas avoir peur. La peur est contagieuse et se transmet rapidement, j’espérais que mon enthousiasme puisse aider certains à garder le moral et l’envie de continuer. Les humains semblaient garder confiance, et les Nephilim quand à eux semblaient moins négligent sur le bien-aller des humains, c’était quelque chose finalement de plutôt positif. Ce second soir fut bien plus riche en aventures, il était apparent que si les Lilim et Lilioth faisaient attention aux humains, c’était pour l’Orgone et il leur en fallait. Je n’entendais pas y « échapper » si l’on pouvait dire ainsi puisque je prenais sur moi de jouer le jeu de la survie autant que faire se pouvait. Les tentes avaient été distribuées, et il y avait été décidé d’un commun accord avec Lyra que nous partagerions la même. J’avoue avoir ressentis une pointe d’appréhension avant cette nuit-là, me demandant comment les choses allaient se passer avec la Nephilim. Après tout depuis le début je devais lui donner l’image de quelqu’un plein d’assurance et d’envie de vivre. C’était le cas, mais c’était un peu chiqué. Quoi qu’il en soit, je ne changeais rien et bien décidé à l’aider je ne comptais pas lui refuser de l’orgone. Je dus cependant admettre qu’elle parvint à me surprendre au plus haut point. Elle n’avait aucune envie de contraindre des humains à coucher avec elle et me proposait un pacte. Sa protection contre de l’Orgone quand elle en aurait besoin. J’aurais peut-être pris le temps de la réflexion en d’autres circonstances, mais je répondis d’un « oui » immédiat accompagné d’un clin d’oeil. Hésiter l’aurait sans doute mise mal à l’aise, et puis elle était belle, gentille et me proposait de me protéger, n’aurait-ce pas été idiot de refuser ? Et comme une manière de sceller le pacte définitivement, il fut scellé par le plaisir, et ce cher Orgone.
Et le temps devint long, très long. J’avais perdu le compte des heures, des jours et des semaines. Depuis combien de temps étions-nous là ? Une semaine ? Plus ? Des mois peut-être ? Dans cet univers de peur constante, garder confiance et le sourire m’usait, mais je fis en sorte de m’assurer que cela continue encore et toujours, pour les humains, pour les Nephilim et pour Lyra. Je ne sais pas si quelqu’un m’a un jour reproché ma bonne humeur, mais je la conservais malgré tout, il était hors de question de perdre pieds et espoir. Je devais cependant l’avouer, plus le temps passait et moins j’avais le sentiment que nous sortirions un jour. Je faisais confiance à Harahel et si j’avais un jour douté de lui il avait dû y avoir une raison ponctuelle car j’avais décidé de lui faire confiance. C’était idiot finalement, tout le monde avait fois en un Lilioth qui disait connaître les lieux, mais finalement avions-nous la preuve qu’il nous tirait vers la sortie ? Tout se ressemblait beaucoup trop rigoureusement, c’était un labyrinthe, rien ne prouvait qu’il n’était pas aussi perdu que chacun de nous. Mais encore une fois face au doute et la crainte, des sourires et des paroles rassurantes.
Il y eut des expériences bien sûres en ce lieu sinistre, me laisser guérir par un Nephilim fut l’une des toutes première expériences surprenantes que je connus. De moi-même je n’aurais surement jamais accepté que ce soit le cas, mais Lyra avait su m’y contraindre. Pas par le violence, mais par un chantage des plus basiques, elle arrêtait l’orgone si je ne me laissais pas soigner, surement avait-elle déjà compris qu’il n’y avait rien que je ne ferais pour être sûre qu’elle sorte d’ici vivante. Peut-être avait-elle bluffé. Je n’avais pas voulu prendre de risques, d’autant que plus les jours passaient et plus nos discussions étaient rares. J’essayais de lui parler, mais elle semblait de plus en plus distante, semblant vouloir se murer dans un univers de silence et de pensées. Et les expériences suivantes furent bien différentes. Parler d’expérience était sans doute faux, il s’agissait plutôt d’orgone, par chance nous étions un petit groupe d’humain et nous parvenions à donner assez aux Nephilim pour notre protection. Cependant « fidélité » n’existait définitivement plus ici, moi-même je connus d’autres Nephilim que Lyra, mais toujours je m’arrangeais pour qu’elle ne soit pas en reste. Je doute qu’elle ne l’admette si ça avait un jour été le cas, mais je crois ne jamais avoir failli à notre pacte, je l’espérais.
Les ressources finirent par s'amenuiser tant que cela devenait véritablement inquiétant, mais la chance finit par nous sourire, si l’on peut dire cela ainsi. Nous avions fini par rejoindre cet endroit qui nous permettrait finalement de partir d’ici. Du groupe que nous étions au début, certains avaient disparu, les disparitions étaient régulières et frappaient autant les Nephilim que les humains. Non que ce soit une consolation bien sûr. D’autant que la mort n’était jamais loin. La traversée ne fut pas des plus aisés, si elle commença bien, tout changea violemment quand des serpents géants passèrent à l’attaque. Les Nephilim se battaient pendant que les humains tâchaient à survivre en se cachant sur le bateau qui tanguait dangereusement. Le combat faisait rage, l’inquiétude marquait les visages des humains comme sur celui des Nephilim. Certains avaient trouvé refuge dans la cale très rapidement, d’autre comme moi avait eu le malheur d’être mal situé pour rejoindre rapidement la cale. Je traversais le pont du bateau aussi promptement que possible, l’eau rendait le pont glissant et les mouvements du bateau animé par les vagues rendaient la progression difficile. J’attrapais dans mon hasardeux cheminement la main d’une humaine ou d’une Nephilim je n’en savais trop rien qui glissait sur le pont. Et finalement je rejoints la cale et les autres humains avec cette personne. La peur se lisait sur les visages et elle ne semblait pas déplacée quand le lendemain nous découvrîmes le prix qu’avait coûté notre survie.
Mais il fallait continuer. Par chance le reste du voyage fut bien moins agité, et l’étendue sableuse paraissait presque une sinécure. Des dangers se cachaient-ils entre les grains de sable ? Vu l’endroit j’étais prêt à parier que oui, mais mieux valait continuer de sourire, tout simplement parce que nous étions encore bien vivant, et parce qu’il y avait cette promesse que demain ne pourrait être qu’un jour meilleur.