Une voix continuait de tambouriner violemment à la porte de mon esprit, c’était ma propre voix que j’entendais dans ma tête, elle me hurlait des ordres de plus en plus fréquents et de plus en plus forts. Je faisais ce que je pouvais pour y obéir, calmant mon esprit et mon coeur qui battait la chamade. A chaque inspiration il s’infiltrait dans mon corps un peu plus de cet air cendré et nocif de souffre. Je sentais à chaque respiration mon poumon s’enflammer violemment, je sentais à chaque fois ma gorge qui m’irritait et cet odeur ambiante de souffre qui tournait ma tête plus encore que le faisait la douleur de mon corps détruit. J’avais finis par me relever au prix d’un effort que mon corps me détestait avoir payé, mes côtes me faisaient souffrir à en hurler, ma tête semblait telle une église, je n’avais même pas remarqué la profonde coupure dans le creux de ma main gauche, ni même le petit doigt de cette même main qui regardait dans le mauvais sens. J’avais posé ma main gauche sur mon flanc droit et j’avais avancé en titubant , longeant les murs pour y prendre régulièrement appuis. Marcher est un calvaire, respirer est devenu un enfer, et la douleur qui semble me demander de respirer plus encore. Mes yeux commencent à m’irriter de plus en plus, l’air est nocif, j’ai le sentiment d’être étranger à mon propre corps, et je marche vers cette personne que je distingue en face de moi. Tout autour de moi, les ténèbres les plus sombres qu’il m’ait été donné de voir.
*C’était la lumière avant, maintenant ceux sont les ténèbres. J’étais ici ; et maintenant, où vais-je ? Où ?* Etais-je donc condamné à mourir ainsi ? Sans savoir ni où j’étais, ni où j’allais ? Etais-je donc soudainement tombé sous la plume de Tolstoï ? Non je n’étais pas mort, et je n’étais pas seul, je ne suis pas de ceux qui abandonnent le combat parce que ça devient trop difficile, je n’ai jamais considéré la mort comme une option, aujourd’hui ne sera pas la première fois...ni même la dernière. Et pourtant, lorsque je tente de répondre à la demoiselle, je sens cet air impur infiltré mes poumons avec avidité, je sens mes yeux se clore, et je tombe à genoux, rattrapé par les mains de la demoiselle dans cette position, juste devant elle. La lointaine chaleur de son corps contre ma tête, je me sens dérivé de plus en plus, et soudain à nouveau ma propre voix qui hurle de me réveiller. Dans un sursaut mes yeux s’ouvrent et sans m’en rendre compte, je suis debout devant la demoiselle, un pas entre nous. Je ferme les yeux le temps de me calmer, gardant un équilibre précaire sur mes jambes, et finalement j’ouvre les yeux pour lui répondre, mais je la vois à son tour sembler peu en forme, vaciller doucement. Mes mains se posent sur ses épaules comme elle semble perdre l’équilibre, bien sûr ma hanche n’aime pas ce mouvement, mais je serre les dents et je fais comme si de rien était, tâchant de sourire à la demoiselle tant bien que mal. Ne jamais perdre la fois où l’espoir, mon crédo depuis toujours, aujourd’hui ne serait pas le premier jour, je lui répondis finalement avec un soupçon d’humour :
- Je vois pas pourquoi tu penses que ça ne pourrait pas aller. Une quinte de toux me prit comme je tentais bêtement un petit rire, Et puis, ce n’est pas moi qui ait un décolleté ultra-profond.
Je lui adressais encore un sourire, enfin un rictus ressemblant à un sourire en désignant du regard le haut de sa robe déchirée. Enfin ma tenue n’était pas vraiment impeccable non plus. Mon jean déchiré et brulé, ma chemise avait changé de couleur, des trous étaient venus la décorer, quand à mon T-shirt en dessous, il semblait à peine en meilleur état. Tant bien que mal, j’enlevais ma chemise, m’étant tourné non par pudeur mais pour cacher à la demoiselle la douleur de mes côtes. Son bien-être passait avant le mien, raisonnement crétin mais mon raisonnement personnel. Je lui fis enfiler la chemise, enfin ce qu’il en restait, et fermais juste un bouton à hauteur de sa poitrine de façon à la couvrir. Je me risquais à encore un peu d’humour avant de me présenter :
- Un peu de décence mademoiselle, vous n’êtes pas seule ici. Je m’appelle Rayden et...j’aurais dis enchanté si on s’était rencontré en d’autres circonstances. Toi ça va aller ? Tu sais quelque chose sur cet endroit ?
Autour de nous, pas mal de bruits, des pas, des battements d’ailes, des voix, beaucoup de choses peu rassurantes, et si je tâchais d’afficher de l’assurance et un semblant de sourire, mimant que tout allait avec un certain brio, je devais avouer que je n’étais absolument pas rassuré le moins du monde.